lundi 22 mai 2023

Les crayons feutre Buffalo

 Voilà le printemps qui s’amène et de là, on voit finalement la fin des classes. Dehors la neige a complètement disparue et la température s’élève peu à peu. C’est un samedi matin d’avril et la météo prévoit une journée ensoleillée avec une température fraîche mais confortable. Je termine mon bol de Count Chocula, mon troisième, et le termine rapidement parce que je piaffe de descendre dans le garage et sortir ma bicyclette pour la première fois de l’année. Je m’habille à toute vitesse mais y’a un truc qui m’échappe; de soleil dehors, y’en avait pas. Le ciel était tout gris et c’est seulement lorsque je me suis collé le nez à la fenêtre que je me suis rendu compte qu’il pleuvait tout plein. Bon, ben il semble que ma première promenade sera reportée. Heureusement je suis un enfant parfaitement incapable de s’ennuyer et je réoriente donc mon programme du jour en conséquence.


Dans ma tête se bousculent les possibilités; faire des vaisseaux spatiaux avec mes Lego en écoutant des cartoons à la télé, m’occuper de ce modèle réduit qui n’attend, inventer de nouvelles aventures avec mes figurines GI JoeSteve Austin, Big Jim et du prof Bergman, faire des courses d’élimination entre mes voitures Matchbox et Hot Wheels. Et ce ne sont là que les choses auxquelles j’ai pensé durant les trois premières secondes. Finalement j’ai opté pour appeler l’ami Daniel, celui qui m’avait montré à bien assembler les modèles-réduits. Une demi-heure plus tard nous étions installés dans sa cuisine, bien attablés avec une provision de feuilles de papier ainsi que nos magnifiques ensembles de crayons feutre Buffalo, tous alignés dans une belle boîte en métal ornée d’une reproduction du Déjeuner des canotiers, de Renoir. De vulgaires crayons de cire? Surtout pas! Là, au son d’une version disco de Star Wars (Meco) qui jouait de par de petits haut-parleurs dans la cuisine, on barbouillait pendant des heures des scènes du film qui venait tout juste de sortir. La séance se terminait lorsque la mère de Daniel en avait raz les oreilles d’entendre la fameuse toune de la cantine ad repetitio. Mais bon, c'est un exemple parmi mille! Je me souviens avoir passé des pans de journées entiers à crayonner tout un fourbi de trucs; fusées, voitures, extra-terrestres, animaux étranges, scènes d'action... 


Avant d'aller plus loin, un mot sur l'œuvre choisie par Buffalo pour orner cette boîte. Il s'agit d'une magnifique toile d'Auguste Renoir intitulée "Le déjeuner des canotiers". Cette peinture se définit comme suit; 


Nous sommes à la fin de l'été 1880 à Chatou, une commune dans le département des Yvelines, un peu au nord-ouest de Paris. Sur la terrasse de "La Maison Fournaise" qui est une auberge et guinguette , Auguste a réuni des amis et modèles pour une grande œuvre. La dame au petit chien s'appelle Aline Charigot, c'est la future épouse d'Auguste Renoir. Derrière elle se tient debout Hippolyte Alphonse Fournaise, fils du propriétaire de l'auberge. Accoudée à la rambarde c'est Alphonsine Fournaise , sa sœur, qui écoute le Baron Raoul Barbier, bien assis et dos tourné avec un chapeau melon. Gustave Caillebotte, peintre également, est assis à droite à califourchon sur une chaise. Le couple près de lui est Ellen Andrée, laquelle est actrice tandis qu'Adrien Maggiolo, directeur du journal "La France Nouvelle" se penche vers elle. Derrière eux , le petit trio est formé du journaliste Paul Lhote avec un pince nez , Eugène Pierre Lestringuez au chapeau melon noir et l'actrice de la Comédie Française Jeanne Samary. La jeune modèle au verre d'eau est Angèle Legault. Derrière elle debout se tient le critique d'art et collectionneur Charles Ephrussi coiffé d'un chapeau haut de forme et éditeur de la Gazette des Beaux Arts. Il converse avec le poète Jules Laforgue. 

Notez que si l'envie vous prend, il est possible de visiter la Maison Fournaise et de prendre un repas sur la même terrasse où l'artiste y a peinturé ses amis et convives. On clique ici!



En ouvrant la boîte on retrouve sous le couvercle des conseils pour l'entretien des crayons, les différentes couleurs qu'on y retrouve ainsi que d'autres petites astuces dont le proverbial avertissement de remettre le capuchon dès que l'on a terminé de s'en servir. À défaut de le faire, le bout séchait et pouvait rendre la pointe feutre inutilisable. Il se trouve également une feuille protectrice en styromousse. 

Saurez-vous trouver la coquille dans la description des couleurs? Indice, il s'agit d'une bien mauvaise traduction.



Et voici l'ensemble des crayons que l'on y retrouve. À noter que ceux-ci, qui sont les miens, écrivent encore, ce qui hautement appréciable après toutes ces années. Buffalo offrait d'autres boîtiers de crayons dans des formats différents, dont une boîte plus petite et ornée d'une peinture de Rembrandt; L'homme au casque d'or, circa 1650. Il aurait été un peu bête de jeter la boîte si les crayons atteignaient leur durée de vie utile et c'est pourquoi Buffalo vendait aussi ces crayons à l'unité, permettant du coup de les remplacer individuellement. 


Le saviez-vous? Le premier crayon feutre a été inventé et breveté par un certain Lee Newman en 1910. Il s'agissait d'un tube empli d'encre et directement connecté à une pointe feutre poreuse permettant le passage de l'encre. Des amélioration ont été apportées en 1926 et 1944 mais la version finale du produit a été mise au point par la Tokyo Stationery Company en 1962. 

lundi 3 avril 2023

La Caillette et ses karts

Il y a neuf ans de cela je vous parlais de cette crèmerie mythique au Québec; la Caillette. Et dans cet article je vous racontais que durant les visites que l'on y faisait lorsque j'étais gamin il y avait ces karts et que l'on pouvait conduire sur une piste aménagée. 

Malheureusement, personne dans la famille n'a pensé un jour prendre une photo ou deux, histoire de se remémorer l'endroit. Or aujourd'hui, et grâce à une précieuse contribution de la famille Lemay, je vous offre quatre photos de ces karts prises à deux périodes différentes. 

(Crédit photo: Famille Lemay, utilisée ici avec leur aimable collaboration)

Sur cette première photo qui date de 1967 ou 1968, on peut voir non seulement un des karts mais aussi le décor. Un petit moulin en pierre à côté duquel se trouve une fermière et une vache. Sur le terre-plein on voit un réverbère double. Derrière, des terres agricoles et des maisons. 

(Crédit photo: Famille Lemay)

Toujours en 1967-68, voici un autre enfant de la famille qui ne manque pas de saluer la personne en train de prendre la photographie. Ces karts fonctionnaient avec des petits moteurs à deux temps et la vitesse était relativement basse, mais quel plaisir que c'était de les conduire! 

(Crédit photo: Famille Lemay)

Nous faisons ici un bond vers 1972 ou 1973 et cette fois, en couleurs! On arrive ici à mieux distinguer les détails de ces fameux karts et dont le style rappelle les vieux tacots des années 20. À l'arrière on aperçoit une station-service Esso, laquelle existe toujours mais sous la bannière Ultramar. Le plaisir de la fillette au volant du car ne ment pas quant aux joies du karting. 

(Crédit photo: Famille Lemay)

Même fillette et son passager de garçon pris sous un autre angle. On peut voir ici que c'est le petit bonhomme qui s'en donne à cœur joie. On peut d'ailleurs voir, à l'arrière de la voiture, le rudimentaire moteur à deux temps et que l'employé faisait démarrer comme on le fait avec une tondeuse. Il arrivait parfois que le moteur ait des ratés sur la piste et le type devait alors accourir pour le faire redémarrer. 

Je tiens ici à remercier la famille Lemay pour cette précieuse contribution et j'espère que cela pourra apporter de biens bons souvenirs à tous les gens qui ont conduits ces petits bolides durant leur enfance. 





Le saviez-vous? Le premier kart a été inventé par Art Ingels à Los Angeles en 1956 et le karting est le sport motorisé le plus populaire au monde!


jeudi 16 février 2023

Morgan's

 

Morgan's est un magasin qui a une longue histoire. Ouvert en 1845 à l'actuelle adresse 404 Notre-Dame ouest, il est déménagé au 478 McGill en 1852, puis en 1866 sur le côté nord de Saint-Jacques, alors appelé St-James, près du Square Victoria. Le centre des affaires dans le temps était le Vieux-Montréal. Au delà, au nord, à l'est et à l'ouest, on retrouvait des villages et de nombreuses terres agricoles. 

C'est en 1891 que Henry Morgan fait un pari considéré insensé par pas mal tout le monde: se relocaliser sur la rue Ste-Catherine, laquelle ne ressemblait en rien à la rue commerciale que l'on connaît aujourd'hui. Il s'agissait alors d'un rue paisible avec de belles demeures et des vergers. Malgré les nombreuses voix qui annoncent à Morgan qu'il va se planter financièrement en se relocalisant loin du secteur commercial du Vieux-Montréal, il persiste. Et signe. 

S'élève alors un magnifique magasin de trois étages avec un magnifique extérieur en grès rouge d'Écosse. Morgan est convaincu que le succès suivra, et il gagne son pari au point où le célèbre joaillier Henry Birks l'imite, en faisant construire son magasin de biais avec Morgan's. À partir de là s'est opérée une migration progressive des commerces vers la rue Ste-Catherine. 

En 1950, profitant du boom économique de l'après-guerre, Morgan's décide d'ouvrir des succursales, un peu à l'instar de Eaton's et Simpson's. Le premier est ouvert en 1950, et se situait sur le chemin de la Reine-Marie dans le secteur de Snowdon. Puis, d'autres suivront, dont celui que l'on voit sur l'image ci-haut. 

Nous sommes au tournant des années 60, et l'on voit ici la succursale de Morgan's située dans le centre commercial Boulevard à partir du boulevard Pie-IX. Tous les deux ont été inaugurés en 1953. En 1958, fort du succès que connaît le magasin, Morgan's fait ajouter un deuxième étage. Deux ans plus tard, La Baie se porte acquéreur de Morgan's, mais le nom de Morgan's est conservé, d'abord jusqu'en 1964 en Ontario, puis jusqu'en 1972 au Québec. 

On remarque l'architecture simple mais résolument moderne du bâtiment. La mosaïque de béton multicolore est agrémentée d'un éclairage . La brique uniforme est quant a elle agrémentée du nom de Morgan's Boulevard. Le tout se conjugue pour donner une allure simple, mais élégante. Toutefois, le temps n'a pas été tendre; au début des années 70 on a décidé de couvrir la brique avec des panneaux d'aluminium, ce qui sapé tout le style pour en faire une façade quelconque, banale, laide et sans âme. Jugez-en par vous-même: 






Le saviez-vous? Le centre d'achats Boulevard a été le troisième centre commercial a ouvrir à Montréal, mais il a été le premier à être entièrement à l'intérieur. À son ouverture en 1953 il comptait pas moins de 32 magasins. 

samedi 21 janvier 2023

Des films par la poste

Dans le dernier article, portant sur la photographie, je vous parlais de ce petit monde tel qu'il était avant l'arrivée du numérique. J'ai aussi glissé sur les caméras, les différents films utilisés ainsi que du développement, lequel prenait un certain temps. Et justement, quoique les  adeptes et professionnels pouvaient très bien développer leurs propres films chez eux, ou dans leur labo personnel, pour monsieur et madame tout le monde les films étaient laissés au comptoir photo de son choix. 

La plupart des pharmacies offraient, et offrent encore ce service mais il y avait également des boutiques photos comme Direct Film (aujourd'hui disparu), Astral photo, L.L. Lozeau, le Centre Japonais de la photo, lequel existe toujours, et bien d'autres encore. 

Peu importe l'endroit la façon de procéder était la même; on laissait le rouleau au comptoir alors que le commis nous demandais, par exemple, de choisir un finit mât ou lustré, si l'on voulait des doubles ou de multiples exemplaires pour distribuer à la famille, ainsi que nos coordonnées afin de nous aviser lorsque les photos seraient prêtes pour le ramassage. Le service de développement traditionnel prenait environ une semaine ou deux mais il y avait aussi un service de traitement plus rapide, généralement 24 heures, quoiqu'un peu plus cher. Ensuite l'on nous avisait par téléphone et il ne nous suffisait que de passer les cueillir. Mais il y avait une autre service disponible: le traitement par la poste. Et ça, c'était l'affaire d'une compagnie nommée Express Film. 

Publicité d'Express Film, 1971)
(Photo: Collection personnelle) 

Cette compagnie, aujourd'hui disparue, ne vendait pas d'appareils, d'objectifs ni même aucun accessoire. En fait, elle n'avait même pas de boutique! Ce qu'elle avait toutefois était un laboratoire complet de traitement de photos. Alors, comment ça fonctionnait? 

(Photo: Collection personnelle)

Express Film ne faisait affaire avec les clients que par l'entremise d'enveloppes qui se trouvaient dans les pages de différentes revues, comme ici, tirée d'un Sélection du reader's Digest. Les instructions étaient on-ne-peut-pas-plus-claires. Il suffisait de remplir adéquatement, de déposer le rouleau à faire développer dans l'enveloppe, de cacheter, et de mettre à la poste. Même pas besoin d'un timbre puisque les frais de poste étaient affranchis par Express Film, comme on le voit en haut à droite. 

(Photo: collection personnelle)

L'endos de l'enveloppe servait à indiquer le film envoyé, ainsi que les détails que l'on voit. Fallait tout de même inclure 10 sous pour les frais de retour ainsi que la taxe de 8% (l'on y échappe pas). C'était l'époque où l'on pouvait inclure des pièces sonnantes et trébuchantes dans le courrier. Et voilà, le tour était joué. Ensuite, fallait simplement faire preuve d'un peu de patience pour voir les photo rebondir dans la boîte aux lettres. 



Le saviez-vous? Le service de développement en une heure, très apprécié des gens, ont été introduits au Canada par le Centre Japonais de la photo, boutique qui a vu le jour en 1959. Dès les années 70 on retrouvait des succursales dans presque tous les centres commerciaux. 

samedi 14 janvier 2023

L'art des illustrations Matchbox

Les plus vieux se souviendront des voitures Matchbox vendues dans des boîtes (l'origine de ces boîtes et du nom Matchbox dans cet article-ci). Lesney aurait pu imiter une autre compagnie britannique qui fabriquait des voitures en métal moulé, Husky, et n'utiliser qu'un emballage générique pour tous ses véhicules pour sauver des sous, mais on a préféré faire autrement. On avait décidé de mandater des artistes afin qu'ils reproduisent fidèlement les véhicules se trouvant à l'intérieur. On retrouvait aussi ces mêmes illustrations dans le catalogue annuel, lequel était gratuit sur demande en magasin, ou par la poste. 

Il y a, je crois fermement, quelque chose de particulier avec ces illustrations faites à la main, ce petit plus que l'on ne retrouve pas dans celles d'aujourd'hui, lesquelles sont entièrement faites via des logiciels comme Adobe Illustrator, Photoshop ou autres. On y perçoit ici le trait de l'artiste fait au pinceau en utilisant différents médiums. Ceci dit, j'ai préparé pour vous une petite galerie de ces illustrations que l'on aimait bien admirer lorsque nous étions gamins. 













































































Le saviez-vous? On estime que depuis 1953 il s'est fabriqué pas moins de trois milliard de véhicules Matchbox.